Mon rêve : interprète LSF
Quatre semaines de formation
Et toujours pas un seul problème.
L’apprentissage, l’intégration
Se font sans peine à l’USM.
Chaque jour est fait de découvertes,
En grammaire, en vocabulaire.
Chaque jour, je me sens plus ouverte,
L’avenir me paraît plus clair.
Je veux devenir interprète !
Réussir tous mes examens,
Offrir aux Sourds une aide concrète
Etre leurs oreilles et leurs mains.
On dit de moi : « Elle est sympa ! »
On croit que j’agis par pitié.
Mais la pitié n’existe pas
Quand on est à égalité.
Ils n’entendent pas mais expriment tout.
Leurs yeux voient plus loin que les nôtres.
Ont-ils vraiment besoin de nous ?
Peut-être comme amis, comme apôtres…
Ils partagent leur langue, leurs idées,
M’invitent à comprendre leur combat
Pour se fondre dans la société
Et enfin faire valoir leurs droits.
Leur droit à une éducation
Qui tienne compte de leur différence.
Leur droit à une intégration
Faite de respect, de tolérance.
Un interprète est un outil,
Un pont jeté entre deux mondes,
Un être humain qui a envie
Que tous se parlent et se répondent.
Enfin, pour la toute première fois,
Je me sens comprise, écoutée.
Grâce aux Sourds, j’ai trouvé ma voix (voie…)
Leur accueil, leur chaleur m’ont plu.
Je m’en doutais, ils le confirment,
C’est notre jugement qui leur nuit.
Ne pas entendre n’est pas un crime
Ni une tare, ni une maladie.
Rien que le terme « Malentendant »
M’agace et me hérisse les poils
Car très clair’ ment il sous-entend
Qu’ils feraient quelque chose de mal… ?
Par accident ou génétique
La surdité est imposée
Et ne mérite pas nos critiques,
Notre mépris, notre pitié.
Au contraire, c’est d’l’admiration
Que nous devrions ressentir
Face aux efforts et aux actions
Que font les Sourds pour s’en sortir.
Lire sur les lèvres, oraliser
Nous enseigner la LSF
N’est-ce pas la preuve là qu’ils sont prêts
A oublier tous leurs griefs ?
Oublier qu’on a interdit
Aux Sourds d’utiliser leur langue
Et ce pendant des décennies
Les enfermant comme dans une gangue.
Oublier les remarques blessantes
Qui entachaient tous leurs bull’ tins :
« Elève stupide, parfois méchante ! »
« Elève dissipé, sans entrain ! »
La discrimination existe
Au travail, dans la vie, la rue.
N’est-ce pas une attitude raciste
Que d’en faire d’office des exclus ?
Ils ont tant à nous apporter
Pour peu qu’on leur offre notre écoute.
Avec nous, veulent communiquer,
Pour chasser nos peurs et nos doutes.
Nos doutes sur leurs capacités
A prendre la place qui leur revient
Au sein de notre société
Pour vivre ensemble, main dans la main.
Moi qui depuis peu les côtoie
Qui aies la chance de leur parler
J’aimerais être leur avocat
Et souhaite me battre à leurs côtés.
Afin qu’on reconnaisse leurs droits
La LSF, je veux apprendre
Et traduire de mes mains, mes doigts
Tout ce qu’ils souhaitent nous faire comprendre.
Rien qu’en France, ils sont 5 millions
A ne pas compter sur l’ouïe.
Il est temps qu’ils quittent leur prison
S’expriment comme ils en ont envie.
Deux cents quatre-vingt dix à peine.
Est le nombre des interprètes
Des hommes, des femmes qui se démènent
Pour apporter une aide discrète.
La France, terre de fraternité,
De liberté, d’égalité
Doit encore beaucoup progresser
En termes de solidarité.
Et comme tous les gouvernements
Promettent mais ne veulent pas agir,
C’est à nous de prendre les devants
Pour un meilleur monde nous bâtir.
Alors si vous avez envie
De connaître les Sourds, leurs problèmes,
Faites comme moi et dès aujourd’hui,
Poussez la porte de l’USM.
Enki le 14.03.2010